Lorsque vous êtes confronté à un litige devant les juridictions civiles, il est crucial de maîtriser les règles de procédure pour faire valoir vos droits. Parmi ces règles, les exceptions de procédure jouent un rôle clé. Véritables gardiennes de la régularité des actes accomplis pendant l’instance, elles permettent de sanctionner les irrégularités et d’assurer une bonne administration de la justice. Découvrons ensemble ce mécanisme indispensable du Code de procédure civile.
Qu’est-ce qu’une exception de procédure ?
Une exception de procédure est un moyen de défense qui vise à faire déclarer un acte de procédure irrégulier, à suspendre le cours de la procédure, voire à l’éteindre. Définie à l’article 73 du Code de procédure civile, elle se distingue des défenses au fond qui concernent le droit substantiel, et des fins de non-recevoir qui sanctionnent l’absence du droit d’agir.
Imaginons que vous recevez une assignation en justice devant le tribunal de grande instance. En l’examinant, vous vous apercevez que certaines mentions obligatoires font défaut. Vous pourrez alors invoquer une exception de nullité pour faire écarter cet acte vicié et bénéficier d’un délai pour régulariser la situation.
Bon à savoir : L’exception de procédure peut être soulevée par voie de requête ou de conclusions. Il est important de bien motiver sa demande en visant les textes applicables et en expliquant en quoi l’acte est irrégulier.
Les différentes catégories d’exceptions de procédure
Le Code de procédure civile distingue quatre grandes catégories d’exceptions de procédure, chacune répondant à des objectifs spécifiques :
- Les exceptions d’incompétence (matérielle ou territoriale) visent à faire déclarer la juridiction saisie incompétente au profit d’une autre.
- Les exceptions de litispendance et de connexité tendent à éviter la contrariété de décisions en présence d’instances parallèles.
- Les exceptions dilatoires permettent d’obtenir un délai de grâce lorsque le défendeur est momentanément dans l’impossibilité de se défendre.
- Les exceptions de nullité sanctionnent les irrégularités affectant les actes de procédure, qu’il s’agisse de vices de forme ou d’irrégularités de fond.
Prenons l’exemple d’un salarié qui saisit le tribunal judiciaire pour contester son licenciement, alors que le conseil de prud’hommes est seul compétent. L’employeur pourra soulever une exception d’incompétence matérielle pour que l’affaire soit renvoyée devant la juridiction adéquate.
Les exceptions de nullité méritent qu’on s’y attarde. Celles pour vice de forme, comme une assignation incomplète, supposent un texte ou un grief. Autrement dit, la nullité doit être prévue par la loi ou causer un préjudice à celui qui l’invoque. Les nullités de fond, comme le défaut de capacité ou de pouvoir de représentation d’une partie, obéissent à un régime plus strict.
À noter : La jurisprudence a parfois hésité sur la qualification de certaines irrégularités concernant les personnes morales (nullité de forme ou de fond). Le régime des exceptions de nullité comporte aussi des spécificités quant à la prescription de l’action.
Comment invoquer une exception de procédure ?
Le Code de procédure civile pose un principe clair : les exceptions doivent être soulevées « in limine litis », c’est-à-dire avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Il s’agit d’un ordre d’invocation strict, sous peine d’irrecevabilité. Certaines exceptions échappent toutefois à cette règle, pouvant être soulevées en tout état de cause.
Concrètement, c’est généralement le juge de la mise en état qui sera compétent pour connaître des incidents relatifs aux exceptions de procédure. Il pourra prononcer la nullité de l’acte irrégulier, mais aussi accorder un délai pour permettre sa régularisation lorsque c’est encore possible.
Illustration pratique : dans une procédure écrite ordinaire devant le tribunal judiciaire, vous devrez soulever vos exceptions avant toute défense au fond par voie de conclusions. Le juge de la mise en état tranchera alors l’incident.
L’importance de soulever à temps les exceptions
Comme vous l’aurez compris, le respect des règles procédurales est essentiel à la validité des actes effectués devant les juridictions civiles. Soulever à temps une exception de procédure vous permet de faire sanctionner une irrégularité et d’obtenir, par exemple, l’annulation d’un acte de procédure comme une assignation viciée.
Mais attention, si vous invoquez tardivement une telle exception, vous vous exposez à un risque d’irrecevabilité et à une condamnation à des dommages et intérêts en cas d’intention dilatoire. Les juges seront d’ailleurs particulièrement vigilants face aux manœuvres visant à ralentir la procédure, surtout si l’ordre public est en jeu.
Bon à savoir : Si l’exception de procédure est accueillie, l’acte irrégulier sera annulé. Cette nullité peut s’étendre par voie de conséquence aux actes subséquents. Dans certains cas, le jugement rendu pourrait même être rétracté.
Autre point important : le sort des exceptions de procédure en cas d’incident de saisine. Selon les cas (radiation, péremption d’instance, désistement…), elles pourront ou non être à nouveau soulevées. Enfin, le régime des exceptions peut varier en fonction du type de procédure (orale, écrite, spéciale comme le référé) et de la juridiction saisie (tribunal judiciaire, conseil de prud’hommes…).
En définitive, les exceptions de procédure constituent un outil précieux entre les mains des plaideurs pour s’assurer du respect du Code de procédure civile et garantir leur droit à un procès équitable.
Bien les comprendre et les manier à bon escient vous permettra d’affronter sereinement tout litige porté devant les juridictions civiles, de la première instance jusqu’à la Cour de cassation.
À noter : Avec la réforme de la procédure civile et le déploiement des tribunaux judiciaires en 2020, le régime des exceptions de procédure a connu quelques aménagements qu’il convient d’avoir à l’esprit.
L’essentiel à retenir
- Les exceptions de procédure sont des moyens de défense visant à faire sanctionner les irrégularités des actes de procédure. Elles se classent en quatre catégories : exceptions d’incompétence, de litispendance/connexité, dilatoires et de nullité.
- Les exceptions doivent en principe être soulevées avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir, sous peine d’irrecevabilité. Le juge de la mise en état est généralement compétent pour en connaître.
- Bien comprendre et utiliser à bon escient les exceptions de procédure est essentiel pour faire respecter les règles du procès civil et garantir le droit à un procès équitable, de la première instance à la Cour de cassation.