La question de la responsabilité pénale des mineurs est un sujet sensible, qui suppose de concilier la protection de l’enfance et la nécessité de sanctionner certains actes. Un arrêt historique de la Cour de cassation est venu clarifier ce débat : l’arrêt Laboube du 13 décembre 1956.
Les faits à l’origine de la décision Laboube
Tout commence par un fait divers survenu à Strasbourg. Jean Laboube, âgé de seulement 6 ans, blesse involontairement une camarade en jouant avec elle. Bien qu’il n’ait pas eu l’intention de nuire, Jean Laboube est déféré devant le tribunal pour enfants qui le déclare coupable de blessures involontaires. Cependant, aucune sanction pénale n’est prononcée à son encontre. Seule une mesure éducative est ordonnée : sa remise à sa famille. Cette affaire pose avec acuité la question de la responsabilité pénale des très jeunes enfants.
La notion de discernement consacrée par la Cour de Cassation
Saisie en appel, la Cour de Colmar infirme partiellement le jugement. Elle estime que l’âge de Jean Laboube ne lui permettait pas de répondre de ses actes devant la justice pénale, faute de discernement suffisant. L’absence de discernement faisant obstacle à sa responsabilité pénale. La Cour de cassation, dans un arrêt de principe rendu le 13 décembre 1956, entérine cette analyse. Elle fait du discernement une condition nécessaire de la responsabilité pénale des mineurs. L’auteur d’une infraction doit avoir compris et voulu son acte pour pouvoir être déclaré pénalement responsable.
Bon à savoir : le discernement se définit comme la capacité de comprendre la portée de ses actes et d’agir en connaissance de cause. C’est cette faculté de jugement qui conditionne la responsabilité pénale.
L’évolution législative en matière de responsabilité pénale des mineurs
Cette jurisprudence Laboube sera par la suite entérinée par le législateur. L’article 122-8 du Code pénal de 1992 dispose ainsi qu’un « mineur capable de discernement est pénalement responsable ». Plus récemment, le nouveau Code de la justice pénale des mineurs de 2021 consacre même une présomption d’absence de discernement en-dessous de 13 ans. Un enfant de cet âge ne peut donc voir sa responsabilité pénale engagée qu’à titre exceptionnel.
Ainsi, la notion de discernement issue de l’arrêt Laboube guide toujours aujourd’hui l’appréciation par le juge de la responsabilité pénale du mineur. Elle marque un souci de proportionnalité et d’individualisation dans le traitement de la délinquance juvénile.
Par exemple, en 2023, Thomas, âgé de 12 ans, est accusé d’avoir volé un téléphone portable dans un magasin. Bien que reconnu coupable, il ne peut pas être déclaré pénalement responsable en raison de son jeune âge, la présomption de non-discernement s’appliquant. Le juge prononcera uniquement une mesure éducative pour responsabiliser Thomas.
L’arrêt Laboube demeure donc une décision fondatrice du droit pénal des mineurs, consacrant l’importance de prendre en compte le discernement dans l’appréciation de leur responsabilité pénale.